[…] Curieusement, c’est le costume qui avait été pour moi le plus dur à « digérer ». Outre les inversions de rôles, la mise en scène tournait autour du feu (et du fameux pompier), et donc nos habits étaient brûlés, certains sur la manche, les jambes et moi autour… des fesses. L’idée, un peu potache, du metteur en scène, n’avait pas été si simple à accepter. Montrer ses fesses devant une salle payante n’est pas une démarche allant de soi… d’autant que j’étais plus jeune, encore très pudique, moins avancé dans ce métier. La Démarche plus compliqué encore en Avignon où les spectateurs, par rentabilité, sont quasiment toujours au plus près de la scène. En me retournant pour découvrir mes fesses, celles-ci étaient à chaque fois distantes d’à peine dix centimètres de la personne assise au premier rang, au point où on avait intégré dans la mise en scène un temps d’excuses auprès de cette personne… J’en veux un peu à mes camarades et au metteur en scène, que cela faisait beaucoup rire, et qui ne m’ont pas accompagné. Je crois qu’ils n’ont pas pris pour argent comptant mon désarroi face à cette situation nouvelle, et par certains égards, violente pour moi. J’ai surtout très mal vécu la première semaine, car les retours des spectateurs ne tournaient qu’autour de mes fesses : « En tous cas, vous avez de jolies fesses », « C’est des vraies ?  », jusqu’aux questions improbables « Vous les épilez ? » (dont la réponse négative était souvent accompagnée d’un clin d’œil à une voisine ou un regard de reproche silencieux à un mari). L’impression de n’être… qu’un cul ! Finalement, j’ai appris à rire de ces retours et c’est sans doute avec ce rôle que j’ai eu mes plus beaux compliments de comédien : comment ne pas se dire qu’on a réussi son travail quand certains spectateurs sont surpris de voir que vous êtes en réalité un homme ? […]

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« Tous ceux qui aiment ce festival devraient avoir à cœur de lire ce récit, pour comprendre la réalité de ce que vivent ceux par qui il existe : les artistes. »

La Provence