Une résidence
Février 2018, la médiathèque de Roanne me contactait en tant que dramaturge et comédien pour m’offrir une résidence d’écriture. Leur proposition : pas moins de sept semaines fractionnées durant toute l’année scolaire 2019/2020, où j’allais être rémunéré, où j’aurais à disposition un lieu de travail et un appartement pour écrire. Une résidence liée à un projet de création auprès de différents publics (collège, école, ADAPEI, centre social…). C’est avec enthousiasme et non sans une certaine fierté que j’ai accepté.
Pour écrire et donner envie d’écrire
L’ambition était là : récolter les envies d’écriture des auteurs en herbe, les accompagner de la page blanche à l’adaptation.
Six mois plus tard, après la préparation des interventions, la documentation sur le thème vaste et passionnant : « les méchants », la mise en place avec les professeurs, les accompagnants relais, démarrait le projet.
Qu’est-ce qu’il y a derrières les paillettes ?
La première phase : la présentation du monde du spectacle et de ses métiers a été un instant riche en échanges. Les apprentis dramaturges étaient plutôt prompts aux questions, désireux de découvrir l’envers du décor et avides d’anecdotes. L’occasion aussi pour moi de déconstruire son lot de clichés et de fantasmes.
J’écris donc je choisis
La deuxième phase : l’écriture a été un des moments les plus denses et passionnants de ce projet pharaonique. Intervenant dans plusieurs classes avec des âges et des parcours différents, il a fallu jongler avec presque une trentaine d’histoires, faire des choix, canaliser ou encourager l’imagination fertile des jeunes auteurs. Un magnifique terreau pour enseigner les techniques d’écriture (recherche d’une idée, travail des personnages, plan, comment et pourquoi raconter une histoire…) et les spécificités de l’écriture théâtrale. Et surtout pour créer de beaux et surprenants récits.
On ne joue plus
Si une pièce de théâtre se lit, elle a avant tout vocation d’être jouée. Afin que les auteurs en herbe puissent découvrir le processus de création dans son ensemble, la dernière phase était la mise en scène et le jeu des textes écrits. Mais alors que nous allions enfin passer sur le plateau. Alors que l’écriture allait enfin prendre vie. Alors que le fruit de leur imagination allait être passé au tamis de la scène (ou au contraire s’enrichir à son contact), tout s’est soudainement arrêté, en raison d’un certain virus.
Théâtre et masques
Désireux de ne pas terminer ainsi, nous avons cherché, durant tout le confinement et après, comment poursuivre le travail entrepris. En lien avec la médiathèque et les professeurs, nous avons proposé plusieurs formules. Pour des raisons sanitaires, il a été impossible de poursuivre le projet en l’état. Étrange période où le président la république encourageait les artistes à s’investir en milieu scolaire et où le préfet n’autorisait pas les interventions, où l’on cherchait une solution pour effectuer des représentations avec les apprentis auteurs et comédiens alors qu’une à une les dates de tournées étaient annulées.
Afin de ne pas priver ceux qui s’était investis autant dans l’écriture, je suis revenu pour donner avec tous les acteurs en herbe des cours d’improvisation. J’ai bien entendu orienté les séances en m’inspirant de leurs histoires. Et malgré le jeu masqué (pas au sens théâtral s’entend), les récits tronqués, nous avons partagé de chouettes moments.
Ce qu’il en reste…
Au-delà d’une certaine frustration, de n’avoir pu mener à bout le projet, de ne pas avoir accompagné les jeunes dans toutes les étapes du processus de création, restent de belles rencontres, des histoires et des auteurs prometteurs, une pédagogie que j’espère pourvoir transmettre de nouveau.
C’est aussi du temps et des moyens qui m’ont été mis à disposition pour mon écriture. Sans oublier les échanges avec les autres artistes présents en résidence (Metteur en scène, poétesse, chorégraphe, photographe), colocataires d’un soir ou d’une semaine dans l’appartement.
Un grand merci à Magalie, Camille, Simon de la médiathèque de Roanne pour leur incroyable travail et leur accueil, merci Natacha, Sophie, Laure, Hannane, Julie, Isabelle, Philippe, Chloé, ces professeurs et accompagnateurs pour leur travail et l’investissement remarquable dont ils font preuves auprès des enfants. Et merci à tous ces jeunes auteurs (et les moins jeunes de l’ADAPEI), pour ces aventures que nous avons partagées. J’espère pouvoir vous revoir sur les planches ou ailleurs.